La terre et le ciel

30 septembre 2022 - Instantanés de la retraite-randonnée d’automne 2022 à La Ferme.

De bon matin, dans la salle de conférence « Pianissimo » à La Ferme, une trentaine de personnes sont rassemblées. Chaussures de marche aux pieds et vêtements confortables sur le dos, avec et sans handicap, elles écoutent Virginie Kieninger, qui assure l’accompagnement spirituel de cette retraite-randonnée « Marche humblement avec ton Dieu ». Ce matin-là, Virginie parle de la terre. De cette belle terre sur laquelle les retraitants marchent chaque jour, dans la forêt. De cette terre qui est à la fois un garde-manger pour tout une foule d’animaux et de végétaux, mais aussi un garde-boire, puisqu’elle retient l’eau de la pluie pour la restituer aux végétaux en temps voulu. Virginie invite chacun des participants à se demander « Quelle terre je suis ? Est-ce que je sais, comme de la bonne terre, recevoir tout ce qui m’est donné, les bonnes choses comme les moins bonnes, les belles feuilles mortes colorées qui tombent en dansant des arbres (c’est beau) et les déjections laissées par les hordes de sangliers (c’est moins beau), est-ce que je sais recevoir tout ce qui m’est donné, tout intégrer, et faire de tout cela de l’or noir, une belle terre grasse dans laquelle la forêt trouve sa source de vie ? Est-ce que je sais être humble comme la terre ? » Virginie rappelle la traduction latine de terre, « humus » également à la racine du mot « humilité » … Elle cite Origène, L’Evangile, les Pères du désert. Elle parle lentement, avec un grand sourire, et chaque mot résonne. D’ailleurs, l’audience écoute attentivement, on aurait presque envie de dire « religieusement », et dans les intervalles, dans les silences, on entend la VMC ronronner.

Plus tard, en forêt. La première partie de la marche a lieu en petits groupes de 7 à 8 personnes, et en silence. Chacun est invité à s’immerger dans la nature, et à méditer cet extrait du Psaume 84 : « Le Seigneur donne ses bienfaits, et notre Terre donnera du fruit. » Le verset a été redonné au début du chemin, à l’orée de la forêt. Il a été complété d’un geste : à L’Arche, on joint systématiquement le geste à la parole. Une main en l’air, paume en bas (« Le Seigneur donne ») et une main en bas, paume en l’air (« Moi je reçois, et je donnerai du fruit »). Pendant la marche en silence, nous croisons, dans les grandes allées tracées sous les arbres, de bien curieux animaux : à ce qu’il semble, un collège ou lycée a choisi la même matinée et le même secteur pour organiser une course d’orientation, et de nombreux jeunes, silencieux et essouflés, courent dans tous les sens autour de nous. Ils arrivent à un croisement, cherchent une marque ou un repère tout en reprenant leur respiration, et repartent en sens inverse sans plus d’explication. Pendant ce temps, nous avançons. Nous aussi, nous cherchons quelque chose, dans la forêt et en nous. Ce matin-là, nous avons la nature en partage.

Dans la montée vers le point de vue dit « des Beaux-Monts », nous avançons à la queue leu leu, ce qui n’empêche pas les discussions : le temps de silence est terminé, on profite du temps de parole ! Nous rencontrons quelques arbres tout à fait remarquables, tel ce géant au tronc massif : il nous faut nous mettre à 6 ou 7, nous tenant par la main, pour en faire complètement le tour.

Enfin arrivés en haut, nous jouissons d’un panorama exceptionnel sur la forêt, le Château de Compiègne au loin, et la ville en arrière-plan. Le soleil brille dans le ciel, immense au-dessus de nos têtes. L’air est limide, la lumière est très belle, et le vert des feuillages commence à prendre cette teinte tirant vers le jaune qui annonce le début de l’automne, et anticipe l’explosion de couleurs qui va venir. Nous partageons le pique-nique, toujours en petits groupes. Une voiture « logistique » de La Ferme nous a rejoints, et des pliants ont été apportés, pour ceux qui n’ont pas la souplesse permettant de s’asseoir au sol. Autre petite attention : Le café et le thé sont chauds, apportés dans des thermos et servis à chaque retraitant. Après le déjeuner, un temps de partage en petits groupes sur la méditation du matin. Ensuite, nous repartons, le cœur ouvert, prêts à recevoir tout ce que le Seigneur veut donner cette après-midi-là. Comme de la bonne terre, en plein ciel.